Jaylin Williams : Le scouting report

Après avoir effectué moult scouting report durant toute la période précédant la Draft, il était logique d’effectuer les deux derniers scouting report de l’année sur les deux joueurs non-scouté qui ont été drafté par le Thunder dans la nuit de jeudi à vendredi. Heureux hasard, les deux joueurs ont le même nom de famille et vont porter deux numéros sur le parquet particulièrement confondants. Pourtant, on a bien affaire à deux profils différents avec Jalen et Jaylin Williams, deux joueurs qui peuvent apporter de belles choses à OKC. Pour cet article, nous allons nous pencher sur le prospect d’Arkansas, le pivot de 20 ans, j’ai nommé : Jaylin Williams.

Présentation

Pick numéro 34 de cette Draft 2022, le choix de Jaylin Williams est finalement assez évident lorsque l’on voit les qualités du joueur et la philosophie du Thunder. Mais avant d’entrer un peu plus dans les détails, retour rapide sur le garçon. Né en juin 2002 (20 ans le 29) à Fort Smith dans l’Arkansas, il a commencé le basket assez tôt, avec pour figure de mentor son père, qui selon le joueur lui a appris beaucoup de choses, notamment le fait de prendre des charges, point qui va revenir très vite quand on évoquera le jeu défensif de Williams. Il a fait ses débuts en high-school chez lui, à Fort Smith, aux Northside Grizzlies. Il fait donc partie, comme beaucoup de prospects de cette cuvée, des lycéens qui ont vu leur parcours en high-school être stoppé net par le Covid.

Recrue 4 étoiles, il s’engage avec les Razorbacks d’Arkansas à l’été 2020. Le local, qui depuis tout petit est allé voir les matchs d’Arkansas avec son père, va désormais jouer pour cette fac. Pour son année de freshman, Williams attire déjà quelques regards sur lui, de par son profil atypique, mais sera finalement assez peu utilisé (26 matchs joués mais moins de 16 minutes par match). Cette année-là, le prospect en vue du côté d’Arkansas, c’est bien évidemment le déjà champion NBA Moses Moody, qui sera drafté quelques semaines plus tard par les Warriors avec le pick 14.

Avec le départ de son prospect star, Arkansas a bien été obligé de se remodeler et de donner plus de responsabilités à d’autres joueurs, et Jaylin va parfaitement en profiter. Aligné dans le 5 de départ 35 fois sur les 37 matchs, il va rapidement devenir le prospect le plus intriguant de ce programme, et réalisé une saison exceptionnelle : d’un point de vue statistique, on est sur du 11 points, quasi 10 rebonds, plus de 2 passes et plus d’une interception et plus d’un contre par match. Jaylin a été présent dans tous les compartiments du jeu, lui permettant d’obtenir deux récompenses de fin de saison : une place dans la SEC All-Defense, mais aussi dans la 2021-2022 All-SEC, deux sélections qui viennent montrer une grosse progression entre l’année 1 et l’année 2. Avec 364 rebonds captés sur la saison, il a d’ailleurs établi le plus gros total sur une saison dans l’histoire d’Arkansas. Mais le plus impressionnant chez Jaylin Williams reste sa March Madness. En effet, sur les 4 matchs qui ont emmené les Razorbacks au Elite Eight (l’équivalent du quart de finale), le pivot les a tous terminé en double-double. Avec comme bouquet final l’upset du Gonzaga de Chet Holmgren, et un poster sur le futur first pick de la cuvée au match suivant. Je pense d’ailleurs que ces grosses performances durant la MM auront aidé Williams à augmenter son stock pour la Draft et lui assurer une place. Certains auraient peut-être aimé le voir une saison supplémentaire dans le programme, mais il était l’heure pour lui de se déclarer à la Draft. Et ce sera donc avec le Thunder que Jaylin Williams va débuter sa carrière. Le joueur semblait d’ailleurs être très ému au moment de sa sélection, comme on a pu le voir circuler sur Twitter durant les derniers jours.

Le parcours de Jaylin est finalement assez représentatif de ce qu’est le joueur : attachant. On a un joueur qui doit beaucoup à son père, et qui a fait sa carrière universitaire dans l’Etat où il est né, dans le programme qu’il allait voir lorsqu’il était plus jeune. Si on ajoute à cela la belle histoire d’Arkansas durant la Madness, on a un joueur qui dégage déjà un capital sympathie avant même de le voir débarquer sur un parquet. A présent, place au scouting report du joueur, parce qu’il a aussi tout pour plaire sur le terrain.

Le joueur

Pour ce qui est des mensurations de Jaylin Williams, on est sur un profil qui peut manquer au Thunder. Mesurant 208 centimètres, pesant 107 kilos et avec une envergure de 216 centimètres, Jaylin Williams possède le profil physique d’un vrai 5, tant dans la taille que dans le poids. En y réfléchissant bien, ils sont finalement peu nombreux dans cet effectif a cocher autant de critères pour jouer au poste 5. J’en parlerai plus tard quand j’évoquerai son rôle, mais rien que son profil physique lui permettra d’avoir une carte à jouer dans cet effectif.

Bien évidemment, le premier point qu’il faut évoquer lorsque de l’on parle de Jaylin Williams : sa défense, plus précisément ses charges. Car oui, monsieur est absolument élite dans les charges. Avec 54 passages en force provoqués, il est bien évidement le premier en NCAA dans ce domaine et serait à lui seul 3e en NBA dans le classement par équipe cette saison, avec 45 matchs en moins.  Comme je l’ai dit dans la partie présentation, il doit ce sens du passage en force à son père, et c’est pour moi quelque chose qui doit apparaître dès le premier match de Wiliams sur un parquet NBA. Comme n’importe qui qui prend beaucoup de charges, il faut savoir sacrifier son corps et résister, ce qu’il fait sans rechigner. Le joueur semble d’ailleurs s’amuser du fait qu’après tant de charges provoquées, il a appris à ne plus trop ressentir de douleur, notamment parce qu’il a des épaules très costaudes. Comment provoque t-il ces charges ? De deux manières différentes. La première : en venant en aide côté faible. L’attaquant a déjà un défenseur sur lui, il essaye de driver vers le cercle, et Williams vient le cueillir pour provoquer le passage en force. La seconde : lorsque l’attaquant adverse fait une passe, notamment près du panier. Il attend que son adversaire s’approche, fasse la passe, et au dernier moment, il se place parfaitement et provoque une faute offensive. Mais il ne provoque pas uniquement des charges en aide ou près du panier, on l’a aussi vu en provoquer en défendant on-ball sur un intérieur, ou bien dans des zones peu communes, plus au large. 

Dans ce domaine je ne vois pas comment il peut s’améliorer tant tout semble déjà parfait : il sait deviner quand son adversaire va baisser l’épaule, il sait se positionner au dernier moment, il sait qu’il doit toujours un petit peu en rajouter pour faire pencher le coup de sifflet du bon côté et il est capable d’en provoquer à des moments importants, notamment en toute fin de match. Est-ce qu’il en provoquera autant en NBA ? Probablement pas, surtout lorsque l’on voit comment Giannis certains sont arbitrés sur leurs coup d’épaule, mais cela restera toujours une arme dont l’attaquant devra se méfier. Ces passages en force seront pour moi capitaux en NBA, et devront apparaître day one, car en résulte sa capacité à protéger le cercle. En effet, je pense qu’on peut s’accorder sur le fait qu’il n’est pas le plus gros protecteur de cercle, ou en tout cas pas le plus aérien. Bien sûr que j’ai vu des flashs de protection d’arceau, et bien sûr qu’avec plus d’un contre par match il est capable de le faire, mais il ne sera pas le plus dissuasif ou le plus efficace dans ce domaine. Le joueur en est d’ailleurs parfaitement conscient, autre point positif. 

Pour ce qui est du reste de sa palette défensive, on est face à un joueur capable de faire pas mal de choses. Le point que j’ai probablement le plus aimé, c’est sa capacité à couvrir le terrain en drop, notamment dans la gestion de ses pieds et dans le déplacement sur différents angles. S’il ne peut pas attendre sous le cercle pour venir contrer les défenseurs adverses, il peut au moins leur empêcher d’avoir un accès facile grâce à cela. L’utilisation de ses pieds est vraiment un point très positif : même en 1 contre 1 face à des pivots, il sait comment il doit se positionner, comment il doit utiliser son corps pour ne pas être battu. Lorsqu’il doit défendre au poste, on a un joueur qui ne fait rien de flashy, mais qui sait ce qu’il doit faire pour empêcher de concéder un panier marqué. Peu de fautes commises pour un intérieur (moins de 2.5 par match) qui sait quand ne pas sauter. 

D’ailleurs, avec plus d’une interception par match, il est totalement capable de voler des ballons. Comment ? On en revient toujours au même point : l’intelligence de jeu. Ses interceptions sont variées : cela peut-être du bait en drop (faire croire qu’il va monter sur le porteur de balle pour l’obliger à faire une passe, alors qu’en fait il ne monte pas), cela peut-être sur des entry pass (des passes en direction de la raquette, souvent pour du post-up) ou encore au large, bien que moins fréquentes. Dans une NBA qui sur-abuse du pick and roll, je pense que cette capacité de bait lui sera d’ailleurs très utile, et il pourra récupérer pas mal de ballons de cette manière.

Quid de la défense en switch à présent ? Je suis mitigé. Là aussi, j’aime bien la manière de bouger ses pieds, il essaye d’être toujours en mouvement, toujours prêt à anticiper le move du guard adverse afin de le mettre sous pression via sa longueur. Malgré tout, le joueur n’a pas la meilleure vitesse latérale du monde. Face à des joueurs average ça devrait passer, mais face à des joueurs un poil meilleurs, quel sera le résultat ? Pourra t-il vraiment tenir en switch, système apprécié par le Thunder ? Dur à dire, même si finalement les 5 capables de tenir en switch sont peu nombreux. Polyvalence défensive cumulée à intelligence de jeu, mais doute sur sa capacité à protéger le cercle en NBA (en tout cas en tant que protecteur primaire) et doute sur sa capacité à tenir sur des switchs. Malheureusement, si on veut être un pivot très utilisé en NBA, j’ai l’impression qu’il faut maîtriser un de ces deux domaines.

Et alors offensivement, ça donne quoi ? Le profil est particulièrement atypique pour un pivot. En effet, avec plus de 2.7 passes par match, Jaylin Williams est probablement le meilleur pivot passeur de la cuvée. Son principal champ d’action ? Sur short-roll. Ca tombe très bien, le Thunder adore utiliser ces situations. J’ai vu un joueur capable de prendre la bonne décision très rapidement dans ce cas de figure. Mais il est plus qu’un bon passeur sur shot-roll : au poste notamment, on a un joueur capable de montrer ses qualités de playmaking, notamment avec de superbes renversements pour des tireurs. Toujours pas celui qui est le plus flashy, mais un joueur patient lorsque la pression est faible, qui attend un potentiel cut vers le panier mais qui peut aussi prendre des décisions rapides lorsque la pression se fait plus forte sur lui. Ajoutez à cela un potentiel de passeur sur full-court, notamment après rebond (ce qui tombe bien puisqu’il est un excellent rebondeur), et vous obtenez un facilitateur dans une attaque, ce que le Thunder recherche. Seul petit bémol qui n’est pas tant lié au joueur qu’à l’effectif, je le trouve très bon sur short-roll lorsque le meneur est trappé, mais pour ça… il faut des meneurs capables de tirer.

Pour le reste de son jeu offensif, on est sur un intérieur capable de finir près du panier (63% de réussite), même si je ne trouve pas qu’il a quelque chose d’exceptionnel. Son manque de qualité athlétique lui fait parfait défaut, notamment sur le premier saut où il a parfois du mal à réellement décoller du sol. Alors oui, il est capable de le faire, Paolo Banchero peut en témoigner, mais on est pas sur du pur rim-runner. Ce défaut sur le premier saut lui fait d’ailleurs manquer pas mal de tirs, parce qu’il essaye trop souvent de corriger son drive en l’air, ce qu’il n’est pas capable de faire, en tout cas pas pour l’instant. Même en terme de rapidité, là aussi ça pêche. Le match face à Gonzaga est d’ailleurs intéressant : il n’a jamais été réellement capable de prendre Chet de vitesse, et s’en est souvent remis à tenter des runner assez inefficaces. Je pense qu’il pourrait être un meilleur finisseur près du cercle s’il venait à épurer quelque peu son jeu près du panier. Pour le coup, je trouve qu’il a trop de fioritures, il tente parfois des choses trop compliquées et gagnerait selon moi à revenir à des choses plus simples.

Reste son tir. Sur ce point, j’ai envie de faire confiance au joueur mais les stats me paraissent malgré tout assez décourageantes. J’ai évoqué le match de la MM face à Chet et Gonzaga. Williams a terminé ce match avec 15 points à 5/12, mais surtout avec un 2/5 de loin. Pourtant, le garçon a été particulièrement inefficace durant les deux années passées à Arkansas : 30.4 % en année 1, moins de 24 en année 2. L’échantillon n’est pas monstrueux mais finalement assez élevé pour un joueur aussi inefficace (quasi 2 tentatives par match en année 2). Pourtant, le pourcentage au lancer est loin d’être calamiteux (73% sur sa carrière universitaire) et j’ai envie de croire qu’un joueur aussi intelligent sera capable de développer un tir, d’autant plus que je ne trouve pas la mécanique si horrible que cela, même si elle gagnerait à plus de fluidité. Malgré tout, il ne faut pas perdre toute objectivité par sympathie pour le joueur. Moins de 29% de réussite en C&S, ce n’est pas rassurant. Voir des hésitations à prendre le tir, ce n’est pas rassurant, voir les adversaires ne plus monter sur lui au fil de la saison, ce n’est pas rassurant. Pourtant, j’ai déjà vu des joueurs réussir à développer un tir en partant de plus lui que Jaylin Williams, mais il devra encore beaucoup travailler et prendre confiance en son tir s’il veut un jour devenir aussi fiable que son modèle : Al Horford.

Quel rôle et quel apport au Thunder ?

Très honnêtement, je vois un rôle pour lui, ou en tout cas une carte à jouer. Avec un Chet qui va probablement jouer la quasi intégralité de ses minutes au poste 4 et avec un Darius Bazley qui va probablement débuter les matchs en 5, Jaylin Williams peut se retrouver à la lutte avec un JRE pour avoir ce spot de pivot en sortie de banc. Est-ce qu’il aura des minutes dès le début de saison ou fera t-il un tour par la G-League ? Connaissant le Thunder, j’ai plus envie de dire la G-League. Sur le terrain, il apportera ce que Sam Presti réclame de quasiment tous ses joueurs depuis 2 ou 3 ans : de l’intelligence de jeu, de la polyvalence (défensive dans le cas de Jaylin) et une bonne mentalité. Défensivement je le vois bien en association avec un Chet ou un Baze, il pourra ainsi venir en aide pour provoquer des charges ou distribuer le jeu depuis la tête de raquette pour servir un cut de Darius ou pour servir un Chet à 3 points. Reste son association avec JRE, qui est pour moi très incertaine et qui tiendra d’ailleurs plus de la concurrence que de la réelle association. On sait que la mentalité de Presti est de dire ‘’on va drafter, on verra qui va se démarquer’’, ce n’est pas plus le cas au Thunder qu’avec JRE et Jaylin Williams. Reste à voir qui saura saisir l’opportunité, mais je crois que Williams est plus armé pour. S’il développe ne serait-ce qu’un tir respectable, qui oblige les défenseurs adverses à sortir, alors il n’aura plus rien à envie à ce bon vieux JRE, tout en étant plus jeune que lui.

Jaylin Williams a tout d’un bon choix en 34. Dans un range où les bons pivots sont souvent sélectionnés, il coche parfaitement les demandes et la philosophie de jeu du Thunder. Reste malgré tout quelques inquiétudes sur son jeu offensif autre qu’à la création et sur sa capacité à protéger et/ou pouvoir switcher. Cependant, je suis convaincu que Jaylin Williams sera un joueur très apprécié par la commu et qu’il a suffisamment d’intelligence pour savoir dans quel domaine il doit apporter et sur ce quoi il doit travailler. Pour moi, la marge de progression est assez grande, plus qu’un JRE, c’est à présent à lui de montrer que j’ai raison de croire en son potentiel.

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