Les forwards
- Ochai Agbaji (SF, 22 ans, 198cm, 98kg, 209cm d’envergure, Kansas Jayhawks)

Stats 2021-22 : 39 matchs, 35.1 minutes de moyenne
18.8 points, 5.1 rebonds, 1.6 passes, 0.9 interceptions, 0.6 contres, 2.1 turnovers
47.5% au tir (6.6 FG / 13.9 FGA), 40.7% à 3pts (2.6 3P / 6.5 3PA), 74.3% aux lancers (2.9 FT / 3.9 FTA)
Quelle saison aura vécu Ochai Agbaji. Lui, le senior de Kansas, recrue 3 étoiles il y a quelques saison, aura petit à petit, grimpé les échelons du roster des Jayhawks pour devenir titulaire indiscutable en année 2. Son apport en année 3 aurait pu lui permettre de se trouver une place dans la grande ligue s’il s’était présenté l’année derniere. Au lieu de cela, il a décidé de terminer son cursus avec Kansas. Grand bien lui a fait : une saison senior où il a encore progressé, et récompensée par le plus beau des cadeaux : un titre NCAA pour son dernier match sous les ordres de de Bill Self. Ochai n’est d’ailleurs pas étranger à ce sacre, lui qui aura été précieux (bien que parfois maladroit) durant cette March Madness des deux côtés du terrain, en témoigne son incroyable coup de chaud face à Villanova en demi-finale : 21 points à 6/7 de loin ! Le titre du MVP du Final Four en poche, Agbaji peut désormais pleinement se consacrer à son futur en NBA, lui qui est le seul senior à pouvoir prétendre à une place en loterie.
On va être honnête tout de suite : un ailier un peu plus âge que la moyenne, champion universitaire, capable de défendre du 1 au 4 tout en étant un excellent shooter, la comparaison avec Mikal Bridges sonne très vite comme une évidence. Et si Bridges est plus grand de quelques centimètres, les ressemblances sont assez frappantes entre les deux joueurs. De là à dire qu’Agbaji va se développer en l’un des meilleurs 3&D de la ligue ? Ne nous emballons pas.
Première qualité évidente quand on analyse le profil du joueur : son tir de loin. Tout le long de ses quatre années à Kansas Agbaji n’aura eu de cesse d’améliorer cet aspect du jeu, passant des 30.7 en année 1 à 33.8, puis 37.7 pour enfin finir cette année à 40.7 %. Pourcentage qui finalement, n’est battu que par Jabari Smith et AJ Griffin chez tous les joueurs prévu loterie pick et ayant un échantillon aussi élevé. C’est déjà un bon signe, assez révélateur de la mentalité du joueur : il est sans cesse en train d’essayer de progresser. Même aux lancers, où il tournait à un pourcentage assez mauvais comparé à son tir (68.9% en année), il est arrivé à un 74.3 cette saison, déjà plus respectable. Les fameux split au tir, que j’aime toujours autant analyser pour juger la régularité du joueur, sont assez satisfaisants. Hormis le stretch de février et mars qui vient plomber les stats (30.7%), il n’est jamais en dessous des 41%. Assez curieusement, ses meilleurs pourcentages aux lancers ont été obtenus durant cette période plus compliquée pour lui (83%).
Peut-on dire qu’Ochai Agbaji est le meilleur shooter de la cuvée ? Pour ce qui est du catch and shoot, il fait très fortement partie de la discussion, effectivement. Plus de 45% de réussite dans ce domaine, importantissime pour les ailiers qui ne sont pas des ball-handler primaire en NBA. Techniquement on est face à quelqu’un de très propre, qui une nouvelle fois, a su progresser dans la mécanique pour être plus efficace. Le plus impressionnant reste peut-être son jeu de jambes, rien d’innocent quand on sait qu’il a d’abord débuté par le foot, avant ensuite de se mettre au basket. La manière qu’il a de se repositionner après un mouvement sans ballon, ou bien se mettre ses pieds en position de shoot avant même de recevoir la balle, c’est très fort. Globalement un joueur que vous ne pouvez pas laisser ouvert dans un corner, sous peine d’être sanctionné automatiquement. Là aussi, assez facilement projettable dans un futur rôle de 3&D.
Autre point intéressant sur son tir : le jeu offensif de Kansas comporte pas mal de similitudes avec l’attaque du Thunder, en tout cas dans l’utilisation d’Agbaji. En effet, pas mal de tir primé pris par Agbaji sont suite à un double hand-off. Le joueur part généralement du corner, utilise son jeu de jambes pour être ouvert, reçoit la balle, et sanctionne, notamment via un tir qui part rapidement, difficile à défendre et à rattraper si l’on est en retard. Pour ce qui est du range, il a plusieurs fois été en mesure de prouver qu’il pouvait marquer 1 ou 2 mètres derrière la ligne NCAA, chose là encore rassurante dans la projection du tir en NBA. Ajoutez à cela un joueur capable de prendre feu très rapidement, et vous obtenez un shooter hyper-complet, qui coche absolument toutes les cases de ce qu’on demande à un 3&D.
Le 3 est donc là, mais qu’en est-il de la défense ? Et bien là aussi, y’a de quoi être impressionné. D’un point de vue mensurations, il a tout du swingman parfait : la centaine de kilos, une grosse envergure et un bon physique. Seul petit défaut : il lui manque quelques centimètres, ce qui m’empêche de le voir actuellement comme un 4 à plein temps, comme Bridges l’est devenu. Là encore, le système de Kansas est un bon centre de formation à la NBA, puisqu’Ochai a passé la quasi totalité de la saison à défendre en switch. Cela nous permet à nous, en tant qu’observateur, de voir comment il réagi lorsqu’il défend un meneur rapide, et comment il réagi lorsqu’il défend un 4 puissant. Dans les deux cas, c’est du solide. J’ai parlé de son jeu de jambes pour le tir, mais il est peut-être encore plus monstrueux défensivement. Il sait comment réduire l’espace avec son vis-à-vis, comment rester devant lui, comment le contester quand ce dernier va au panier, comment le forcer à tenter des jumpers, etc etc. Pas le plus productif en terme de stats (moins d’1 contre et moins d’1 interception), mais son apport défensif est absolument évident. Pour ce qui est de la défense sur pick and roll, je le trouve bon, mais pas autant qu’en isolation. Actuellement, je le vois déjà être capable de défendre du 2 au 4 sans souci. Pour des 1 très rapides type Garland, j’attends encore, mais sans avoir réellement de doute sur sa capacité à faire bonne figure face à eux.
Finalement, quels sont les défauts d’Ochai Agbaji ? Et bien j’ai envie de dire un peu tout le reste si on exclu le tir extérieur et la défense. Concernant son handle, il a un vrai problème lorsqu’il doit utiliser sa main gauche, ce qui de facto lui fait perdre énormément de potentiel de shot-making. Pas de mi-distance (28.6 % de réussite), plutôt inefficace sur les 3 en pull-up, une création pour les autres qui fait défaut, avec un nombre de turnovers supérieur aux passes décisives et des erreurs de lecture assez grossières balle en main. Pour ce qui est des drives, c’est plus compliqué. Le joueur est très bon lorsqu’il doit se projeter vers le panier sans ballon : comme il est bon athlète et intelligent, il sait se démarquer depuis la ligne de fond pour finir avec un gros dunk, ou bien recevoir la balle sur des flashs backdoor. Et le pourcentage de réussite près du cercle est excellent (72,6%). Mais il ne faudra pas lui demander de se créer son drive : trop peu de handle, un premier jump finalement assez faible comparé à ses qualités d’athlète, pas de runner ou de floater, et un tas de charge sifflées contre lui. Tant de points qui font que le potentiel est bien moindre que chez d’autres joueurs de cet article. Cependant, sans nier les défauts, je dirais qu’ils sont à minimiser étant donné que ce ne sera pas ce qu’on lui demandera de faire en NBA.
Ochai Agbaji est donc probablement le prospect avec le plancher le plus élevé de tout cet article : 3&D déjà prêt pour la grande ligue physiquement, et ce des deux côtés du terrain. Malgré tout, l’âge (22 ans) et le potentiel somme toute assez faible semble interroger sur le choix de le prendre en 12, surtout vu la situation du Thunder. Néanmoins, si Sam Presti veut jouer le choix de la sécurité et du plancher, il n’y a pas meilleur choix. D’autant plus que le joueur a effectué un workout avec la franchise y’a 2 jours, alors peut-être.
Quel rôle avec le Thunder ? Vous prenez les minutes d’Aaron Wiggins (27/28 minutes), vous les donnez à Ochai Agbaji, et vous obtenez un joueur qui sera apprécié de toute la commu. Pour ce qui est de son utilisation sous Daigneault : du tir en catch and shoot dans les corners ou suite à un hand-off, des cuts ligne de fond et de la polyvalence défensive en le faisant switcher sur tout ce qui bouge. Une sorte de version Louis Vuitton d’Aaron Wiggins quoi.

- Ousmane Dieng (SF, 19 ans, 207cm, 97kg, New Zealand Breakers)

Stats 2021-22 : 23 matchs, 20.3 minutes de moyenne
8.9 points, 3.2 rebonds, 1.1 passes, 0.6 interceptions, 0.3 contres, 1.4 turnovers
39.8% au tir (3.5 FG / 8.7 FGA), 27.1% à 3pts (1.1 3P / 4.2 3PA), 66.7% aux lancers (0.8 FT / 1.2 FTA)
Si Ochai Agbaji est probablement le joueur de ce scouting avec le plancher le plus solide, Ousmane Dieng est sûrement celui avec le plus faible. Au terme d’une saison absolument catastrophique collectivement avec les Breakers, le français de 19 ans, qui a décidé de venir suivre son copain et compatriote Hugo Besson (lui aussi drafté cette année), aura grandement déçu en première partie de saison, avant de se rattraper de façon assez spectaculaire sur les 11 derniers matchs. De quoi lui assurer d’être un pick de loterie ? Peut-être pas.
On peut le dire sans trembler : aucun joueur présent dans cet article n’a connu un début de saison aussi calamiteux que celui qu’a vécu Ousmane Dieng. Lui qui a décidé de quitter les parquets de la Nationale 1 en France pour aller tenter une première expérience internationale en NBL, histoire de se frotter à un contexte différent avant l’entrée dans la grande ligue, a été absolument désastreux sur les premières semaines de compétition. Dans un collectif déjà pas évident, son adaptation s’est révélée être beaucoup plus longue et difficile que prévue, si bel et si bien que les stats sont effrayantes : sur les 11 premiers matchs de la saison, Ousmane Dieng c’est 4 points, 2 rebonds, moins d’une passe pour 24,6% au tir, 15,3% de loin et seulement 4 lancers tentés. Beaucoup auraient pu complètement sombrer et ne jamais se relever d’un début aussi dur, durant une année aussi capitale. Mais Dieng a su se reprendre en main, ce qui est déjà positif sur la mentalité et le caractère du joueur. Sur les 11 derniers matchs, le français tournait en 14/4/1, le tour à 48% au tir et plus de 35% derrière l’arc. Alors coup de chaud ou véritable symbole d’un potentiel qui semble très élevé ? Difficile à déterminer.
Face à un joueur de 19 ans encore très brut, il est plus difficile de trouver des qualités que chez un senior de 22 ans, c’est évident. Malgré tout, j’ai beaucoup de mal à trouver quelles sont les qualités réelles d’Ousmane Dieng, qu’est-ce qui fait qu’hormis un plafond purement théorique (dont je parlerai plus tard), tant de gens nous le donne avec le 12e choix, hormis une réflexion purement basique et assez pauvre de »potentiel élevé, joueur atypique, Presti va sûrement aimer » ?
Peut-être sa défense ? Il est vrai qu’il est un défenseur en aide plutôt très solide, et bien plus en avance que nombre de joueurs de son âge. Même les stats ne sont pas les plus impressionnantes au niveau des interceptions (0,6) et aux contres (0,3), je pense qu’il sera plus productif dans ce domaine d’ici quelques années. Défensivement j’aime bien son comportement : toujours alerte à ce qui se passe loin du ballon, fait souvent la bonne lecture défensive au bon moment, sait se positionner parfaitement pour les rotations. En tant que défenseur qui n’est quasi jamais sur le porteur de balle, comme ce que peut faire Giannis (dans une immense moindre mesure), je lui prédit du succès, mais le reste me laisse d’un perplexe.
Premier point : physiquement il va falloir ajouter de la masse physique. Alors oui, difficile de dire que c’est un défaut lorsqu’on couvre une franchise qui a drafté Poku et potentiellement Chet Holmgren, mais sans cette prise de masse, impossible de voir Dieng défendre un 4, voire un 3, tant physiquement il se fait manger, ne serait-ce que par des intérieurs de NBL. Au poste-up actuellement, il ne peut pas défendre. Heureusement pour lui, la NBA n’est pas la ligue qui joue le plus dos au panier de toutes les ligues de basket. Mais alors comment va t-il pouvoir défendre comme défenseur off-ball alors qu’il semble totalement perdu lorsqu’il s’agit de naviguer entre les écrans ? Trop souvent je l’ai vu prendre la mauvaise décision, ou bien ne pas savoir s’il devait passer en-dessous ou au-dessus de l’écran. Et en isolation, je suis particulièrement inquiet. Je ne le vois absolument pas capable de défendre en switch face à des petits meneurs, encore plus s’il y a prise de masse musculaire, tout simplement parce qu’il est pataud, et n’a absolument pas la mobilité ou la vitesse latérale pour rester devant. Je peux me tromper mais pour moi il sera un défenseur batard, incapable au final de tenir sur des intérieurs, ou de rester devant des guards en 1 contre 1, ce qui est fâcheux pour un ailier.
Offensivement, là aussi j’ai mes doutes et je suis probablement plus bas que beaucoup d’observateurs. Si je peux lui donner un point très positif, le handle est vraiment très bon si on le met en comparaison à son âge : il est fluide, capable de dribbler main gauche ou main droite, et peut même encore progresser à l’avenir, peut-être pour être parmi les meilleurs handle chez les ailiers qui ne sont pas des ball-handler primaire. Mais là encore, c’est à peu près tout ce que j’ai à dire de positif. Même la création, pourtant vantée par tant, est loin d’être extraordinaire selon moi. Oui les stats sont assez peu représentatives du réel apport en tant que playmaker. Il sait très bien lire le jeu, sa création sur pick and roll est bonne, il a un bagage de playmaking assez complet (no/look, fakes, etc) mais j’ai du mal à le voir plus qu’un simple second créateur.
Reste au final son plus gros défaut : ses drives vers le cercle et le tir. Alors oui, le tir a été bon sur les 11 derniers matchs. Il a notamment montré de très grosses capacités à pull-up (et marquer) en 1 contre 1, et la mécanique s’est déjà grandement amélioré au fil de la saison. Malgré tout, je ne peux pas m’empêcher de penser qu’on vend un futur shoot à Ousmane Dieng qu’il est loin, très loin d’avoir. Même en Nationale 1 il n’a pas prouvé qu’il était capable d’être un bon shooter (moins de 31% de réussite). Pour ce qui est de l’accès au cercle, hormis un floater (chose que j’apprécie fortement), il s’est souvent retrouvé en difficulté, de par son manque de physique, comme en témoigne les 27 lancers tentés en 23 match. Trop souvent je l’ai vu se faire malmener lorsqu’il partait au drive, notamment main gauche. Je pense malgré tout que ce sera le point où il pourra le plus rapidement progresser, même si le travail à faire est assez important.
Au final, que doit-on penser d’Ousmane Dieng ? Vaut-il réellement un loterie pick ? Actuellement non. Le joueur a trop de défauts qui font que pas mal de joueurs (pas forcément beaucoup plus âgé d’ailleurs) lui sont supérieur. Et même si on se projette un peu, je trouve que le plafond d’Ousmane Dieng est beaucoup trop théorique : un bon plafond pour moi c’est lorsque l’on se base sur des choses que l’on voit déjà chez un joueur, ce qui n’est pas le cas chez le français. Le tir est encore bien trop incertain, sa défense dépendra de l’évolution du physique et le playmaking reste pas mal surévalué à mon goût. Même en prenant compte le plafond, je n’ai pas Ousmane Dieng en loterie pick, reste à voir si Sam Presti pense le contraire…
Quel rôle avec le Thunder ? Difficile à dire tant Dieng semble être un croisement entre les défauts de Josh Giddey et ceux de Poku. Offensivement il peut être utilisé en tant que second créateur avec le banc, dans un 5 avec des bons tireurs… mais même pas sûr que le Thunder possède 4 tireurs fiables de loin. Et défensivement, sur des poste 3 qui jouent off-ball, mais comme il est en difficulté lorsqu’il s’agit de suivre les écrans, compliqué.

- Adrian Griffin Junior (SF/PF, 18 ans, 201cm, 91kg, 213cm d’envergure, Duke Blue Devils)

Stats 2021-22 : 39 matchs, 24 minutes de moyenne
10.4 points, 3.9 rebonds, 1.0 passes, 0.5 interceptions, 0.6 contres, 0.6 turnovers
49.3% au tir (3.7 FG / 7.6 FGA), 44.7% à 3pts (1.8 3P / 4.1 3PA), 79.2% aux lancers (1.1 FT / 1.4 FTA)
Vous le savez si vous suivez le compte assidûment, ou bien si vous avez écoute ne serait-ce qu’un seul podcast ou live sur ces dernières semaines : je suis un très très grand fan d’AJ Griffin. Je pense qu’il est top 4 en terme de plafond, et voir le Thunder trade-up pour le récupérer serait pour moi (comme pour beaucoup d’autres fans dans la commu), le scénario rêvé au soir de la Draft. Malgré tout, ce n’est pas parce qu’AJ Griffin est mon joueur favori de la cuvée que ce scouting sera dénué de tout sens critique. Même si effectivement, le scouting report sera nettement plus positif que celui d’Ousmane Dieng.
Que dire d’AJ Griffin ? Fils d’Adrian Griffin, assistant coach aux Raptors, pressenti à l’époque comme un des candidats à la succession de Billy Donovan, il aura déjà eu à même pas 19 ans, une carrière riche en rebondissements. Absolument dominateur en high-school, considéré à l’époque comme LE prospect de cette cuvée, il a vu cette courbe se stopper net en 2020, lorsqu’il se blesse au genou gauche, le rendant indisponible pour le restant de la saison. Et puis, y’a ensuite eu le COVID qui a retardé la saison 2020-2021. Pendant ce temps Griffin connaît un nouveau pépin physique, cette fois-ci à la cheville. Deux blessures qui lui ont fait perdre ce statut de n°1 incontesté au moment de rejoindre Coach K à Duke.
Soyons honnête : ce qui pêche le plus avec AJ Griffin, c’est le dossier médical. Deux blessures aussi importantes pour un joueur aussi jeune, ça ne peut qu’entraîner des doutes au sein des franchises NBA, et c’est ce même dossier médical qui décidera de la position du joueur à la Draft. Point assez rassurant pour lui : hormis une alerte au genou droit avant de débuter la saison à les Blue Devils, Griffin n’a eu aucun problème de blessure durant toute la saison. Cela veut-il dire qu’il est prêt pour l’intensité de la NBA et ses 82 matchs ? Il faudra attendre sa saison rookie pour le savoir, mais nous ne sommes pas dans un cas à la MPJ ou à la Bol Bol, à savoir une blessure dans son année de freshman. Non, on a bien vu AJ Griffin disputer l’intégralité de la saison NCAA, et ce qu’on a pu voir est très, très excitant.
Première énorme qualité chez le joueur : son tir. 71/159, non ce n’est pas le nombre de lancers tentés par Andre Drummond sur une saison, c’est bien le total d’AJ Griffin à 3pts, ce qui nous fait une hallucinant 44.7%. La mécanique est peu orthodoxe et en même presque parfaite : oui le positionnement des pieds est atypique, il est plus large sur les pieds que sur les épaules, mais dans tout ce qui est haut du corps, c’est techniquement irréprochable. En terme de fluidité, de mécanique, de fluidité et de préparation de tir, peu sont les joueurs de 18 ans aussi propre. Que ce soit en catch and shoot ou en pull-up, il est capable de rentrer les tirs de loin. J’aime tout particulièrement la capacité qu’il a de se relocaliser une fois qu’il reçoit la balle. Dans les corners, à 45 ou face au panier, il est efficace et sera probablement déjà une menace en NBA day one. Et si vous ajoutez à ça un petit step back, vous obtenez un joueur potentiellement élite dans ce domaine. Les splits sont d’ailleurs intéressants, non pas sur le pourcentage de réussite mais sur la quantité prise : d’abord timide en début de saison (moins de 3 tentatives par match sur les 12 premiers matchs), il a commencé à en prendre beaucoup plus (près de 6 par match), sans pour autant perdre en réussite, ce qui peut arriver à certains. Bref, il est une énorme menace de loin et se classe aisément dans le top 5, voire 3, des meilleurs shooters de la cuvée.
Mais AJ Griffin ce n’est pas qu’un tir à 3pts, c’est aussi un mid-range. Là aussi, difficile de voir un jeune de 18 ans plus avancé que lui. Dans ce compartiment du jeu, AJ Griffin est déjà fiable, avec un 41.8% de réussite, pour seulement 21.2% de paniers assistés, preuve qu’il est capable de se créer lui-même son tir (point sur lequel je vais revenir plus tard). Encore plus folle comme stat : 45.4% de réussite sur les tirs en sortie de dribble, avec un échantillon loin d’être minime (plus de 2 tentatives par match). Attention, il y a tout de même un risque que cette saison ne soit qu’un gigantesque coup de chaud, comme ce fût le cas par exemple d’Aaron Nesmith, que j’avais scouté à l’époque. Contrairement à un Agbaji qui a prouvé année après année sa progression, on ne peut pas garantir que Griffin sera un joueur à 39/40% de loin, ou qu’il sera un joueur de mid-range ultra-fiable mais je crois en son tir, trop parfait techniquement pour être inefficace dans la ligue.
On le sait, la différence entre un bon joueur et une superstar réside dans la capacité à se créer son propre tir. C’est d’ailleurs pour ce point que je pense qu’AJ Griffin possède un plus gros potentiel que Jabari Smith, parce que l’upside dans la shotmaking est bon. Alors oui, il faudra encore beaucoup travailler le handle mais il possède déjà quelques moves, notamment tout ce qui est hési/curl/changement de direction. J’ai parlé de son tir mid-range mais il est aussi capable (par flashs encore uniquement) de rentrer de jolis turnaround, parce qu’il a un bon toucher. On verra comment son shotmaking se transposera une fois arrivé en NBA mais je pense qu’il peut, à terme, avoisiner la vingtaine de points.
Même en terme de création pour les autres, ça n’est pas encore ça, mais j’ai plutôt tendance à croire en un développement de cet aspect du jeu. Les stats ne sont pas très significatives (1 passe par match) mais avec très peu de déchet (0.6 TO par match), ce qui n’est pas le cas de tout le monde, et à restituer dans le contexte Duke, où il évoluait avec Paolo Banchero, et où on lui demandait surtout d’être efficace en catch and shoot et sur quelques système balle en main. Est-ce qu’il sera un grand créateur pour les autres ? Non, mais il ne sera pas négatif dans ce domaine.
Malgré tout ces éloges, AJ Griffin n’est pas un prospect parfait, comme l’était un Cade l’année dernière. Son principal problème actuellement, il est défensif. Là encore, le contexte de Duke fait que personne n’a bien défendu cette saison, hormis Trevor Keels et Mark Williams mais qui sont là pour leur apport dans ce registre du jeu. Sur quoi doit-il progresser ? Au choix : faire plus d’efforts pour rester devant son adversaire en 1 contre 1, ou bien gommer à tout prix ce défaut qu’il a de trop regarder la balle et d’ouvrir en grand les backdoors. Dans le premier cas, on est surtout face à un manque de vitesse latérale et d’un positionnement du corps pas forcément idéal, notamment au niveau des hanches. Pour le second, c’est un défaut assez facile à gommer dans un bon contexte défensif comme celui du Thunder, d’autant plus qu’il a prouvé que, quand il le voulait, il était capable d’être un gros défenseur, notamment pour ce qui est des rotations ou bien des aides, ainsi qu’au poste où il est impossible à bouger. Encore une fois, l’upside est monstrueux et il ne demande qu’à être développé.
Le deuxième défaut, c’est qu’il ne va pas au cercle. Pourtant, sur les coupes il est exceptionnel (14/16 sur l’année), et tourne à 72.5% de réussite près du cercle, mais l’échantillon (seulement 58 tirs tentés sur la saison, moins d’1.5 lancer par match) est bien trop faible. De plus, il n’a plus le premier pas et l’explosivité pour lui permettre d’aller au cercle de manière régulière et avec des drives faciles, ce qui m’empêche de le considérer comme un scorer triple-niveau pour l’instant. C’est sûrement sur ce point que les blessures sur les plus handicapantes, et qu’il ne pourra sûrement jamais retrouver le niveau d’explosivité qu’il avait en high-school.
Un tir élite, un potentiel de shotmaking, un passeur fonctionnel, un upside défensif dément et avec quelqu’un avec une excellente mentalité sur et en dehors des terrains, AJ Griffin a tout pour devenir un two-way player absolument dingue dans les années à venir. Il faudra pour ça qu’il soit épargné par les blessures. Mais si c’est le cas, il pourrait bien être le meilleur joueur de la cuvée.
Quel rôle avec le Thunder ? Il y a honnêtement peu de joueurs dans cet article qui seraient aussi utile au Thunder qu’AJ. Il sortirait certainement du banc au départ (là aussi en prenant les minutes de Wiggins) et son tir serait tout de suite impactant, notamment aux côtés de Giddey et Shai. Et défensivement, il serait dans un système qui forme bien les joueurs où il pourrait, associé à Dort, développer cet aspect du jeu, notamment off-ball. Pour son développement comme pour la franchise, on est pas loin du mariage rêvé.
